Extraits tirés de l'ouvrage "la voie du ciel" Claude LARRE 

«SUWEN 2»

Commencement de l' Hiver ; commentaires

« Le soleil est dans la constellation la queue du scorpion. La vertu de la saison d' hiver est comme d' appui et de source, prête à jaillir à la saison prochaine. La présidence passe à l' Empereur " Zèle diligent ", assisté de son génie, " abîme mystérieux ". La manifestation de cette vertu produit des animaux remarquables par la dureté de leur enveloppe, par leurs carapaces. Le sacrifice, fait aux esprits qui protègent les allées menant à la maison, offre des rognons, parce qu' ils sont bas dans le corps et conviennent bien au yin qui règne en hiver.

L' accélération de la marche de l' hiver se manifeste par des précipitations de neige, petite neige (23), grande neige (24) jusqu' au solstice d' hiver (1) qui accomplit en perfection le mouvement yin. Après les neiges, le froid; le petit froid (2) et le grand froid (3) qui se caractérisent par l'absence de toute précipitation. L' eau et la terre qui donnent sa consistance habituelle au sol sont séparés en hiver.

Noirs sont le vêtement et l' attelage du char impérial. La carapace de la tortue frottée de sang, touchée avec une tige de métal rougie au feu, donne des révélations. C' est une manière de savoir le faste et le néfaste, tandis que le ciel et la terre ne communiquent plus. Il en est comme de la femme ou de l' homme parvenus au terme de leur fécondité, le ciel et la terre ne communiquent plus par l' échange actif de leurs influx. Cette fermeture caractérise l' hiver. La fermeture requiert les soins de tous: on ferme, on ferme, partout.

Le coeur de l' hiver est marqué par l' accouplement des Tigres. On retrouve très souvent des tigres en bronze ou en métal doré, le mâle et la femelle, dans les tombes. Ces objets votifs gardent l' espérance de la vie au coeur des froides et obscures chambres funéraires.

Au deuxième mois, le jour est très court, on cherche le soleil, mais on se tient en repos, attendant la reprise des relations entre le yin et le yang. Les sources au sein de la terre obscures se mettent à remuer. On imite les fermetures de la terre et du ciel. Tout ce qui touche à la puissance qui habite les eaux est entouré de précautions respectueuses. On adresse des prières et on offre des sacrifices aux esprits tutélaires des Quatre mers, des grands fleuves, des sources célèbres, des très profonds étangs, des puits et de leurs sources. La convenance mutuelle de l' eau et de l' hiver s' impose.

Le troisième mois répète les caractères du deuxième. La consigne générale demeure : tout doit être concentré à l' intérieur, sinon tout prendrait de l' expansion, contrairement au cours ordinaire de la nature». Ce que disent les commentaires.

traduction

« LES TROIS MOIS DE L' HIVER SONT APPELES : FERMER ET THÉSAURISER.

L' EAU GÈLE, LA TERRE SE FENDILLE; ON N' A PLUS RIEN A VOIR AVEC LE YANG.

ON SE COUCHE TÔT; ON SE LÈVE TARD.

IL FAUT TOUT FAIRE SELON LA LUMIÈRE DU SOLEIL, EXERÇANT LE VOULOIR COMME ENFOUI, COMME CACHÉ

ET S' OCCUPANT SEULEMENT DE SOI, COMME SUR SOI ARRÊTÉ,  SE POSSÉDANT SOI-MÊME.

IL FAUT FUIR LE FROID ET RECHERCHER LA CHALEUR; NE RIEN LAISSER S' ÉCHAPPER

PAR LES COUCHES DE LA PEAU, DE PEUR DE PERDRE TOUS LES SOUFFLES».

En ces trois mois, est consommée la rupture amorcée en automne, entre le ciel et la terre. L' enfouissement des restes végétaux et l' endormissement des insectes caractérisent l' hiver. La terre se fait déserte et le ciel nu; on ne voit plus que le squelette des arbres et des arbustes; ils rappellent les trois saisons écoulées.

En hiver, le nombre des souffles yang se ralentit jusqu' à un point mort. La vie subsiste mais avec peine, en s' enfermant.Un froid de glace, sous les êtres, a remplacé le jeune soleil du printemps.

L' énergie pour vivre est bloquée. Les sources sont saisies par le yin. On se lève tard parce qu' on n' espère guère du soleil et on se couche tôt pour ramasser sur soi un peu de chaleur. Le maigre ensoleillement et le peu de chaleur propres à l' hiver contraignent l' homme à mesurer les actes du vouloir vivre et à les disposer de manière à ne pas perdre de souffles essentiels. Ce qu' on développe longuement.

L' habitation dans la terre était pratique courant l' hiver, au néolithique; quelque chose en a été conservé jusqu' à aujourd'hui. La psychologie des vieillards est un trait accentué de ces précautions. On tourne ses forces vers l' intérieur, on se terre pour échapper à l' étreinte du yin. A la différence de ce qu' on fait en été, où les souffles aiment s' échapper au dehors et peuvent le faire sans inconvénient, en hiver on les contiendra sous la peau; ce qui permet de les concentrer à l' extrême.

Quand le printemps reviendra, les souffles hermétiquement contenus dans le corps pourront jaillir à nouveau avec force.

 traduction

« CECI EST LA CORRESPONDANCE AUX SOUFFLES DE L' HIVER,

C' EST LA VOIE QUI ENTRETIENT LA THÉSAURISATION DE LA VIE.

ALLER A CONTRE COURANT PORTERAIT ATTEINTE AUX REINS;

CAUSANT, AU PRINTEMPS, DES IMPOTENCES ET FLÉCHISSEMENTS,

PAR L' INSUFFISANCE DE L' APPORT A LA PRODUCTION DE LA VIE ».

Les reins sont sous la dépendance de l' eau. Leur puissance s' exerce en hiver. S' ils perdent en hiver ce qui fait leur entretien, ils sont blessés. L' élément bois, principe du foie, perd la capacité de pousser. Le foie a la maîtrise sur les muscles et les tendons. Si l' on observe les commandements du printemps ( au lieu de ceux de l' hiver ), la flaccidité sera la maladie des muscles et des tendons.

Ainsi donc à l' hiver, si on ne peut thésauriser, le vide de yang provoque les fléchissements. Si l' on agit à contre courant de la thésaurisation hivernale, on prélève sur les souffles thésaurisés et au printemps l' apport à la croissance sera faible".

Extraits tirés de l'ouvrage de JM EYSSALET  «les cinq chemins du clair et de l'obscur» Guy Trédaniel éditeur

«L'Hiver, Dong : Ethymologiquement, l'élément phonétique nous montre la « figure d'un écheveau de fil dont le bout est fixé par un lien ou broche pour l'empêcher de s'ouvrir. De là, deux notions : bout, fixation ». Le radical bing signifie geler : « image des rayons que la cristallisation fait apparaître à la surface de l'eau au moment où elle commence à geler, dessin de vitres gelées. L' ensemble évoque la fin glacée de l'année. Le caractère ancien disait cessation de l'action solaire, emprisonnement du Soleil..» (Wieger R17.)

Le Jour le plus court ainsi que l'étoile sceau solaire (mao) servent à fixer le milieu de l' Hiver (solstice).Alors les Hommes se retient à l'intérieur des maisons, les plumes et les poils des animaux s'épaississent. (Tr.J.Lavier - Uranologie chinoise p.55-56)

Le chapitre 2 du Su wen exprime à son tour le règne de l'hiver :  « Les trois mois d'Hiver évoquent une Réclusion (bi cang). L'eau gèle, la Terre se fend, on s'abstient de travailler dehors, on se couche tôt, on se lève tard, pas avant le jour. On se tient comme enfoui, avec l'idée de rester chez soi sans envie de sortir. On fuit le froid, recherche la tiédeur en évitant les transpirations qui épuisent le Souffle. Le dao correspondant est vivre reclus (yang cang). Aller à l'encontre blesse le rein et des Paralysies (wei jue) apparaîtront à la saison suivante qui aura été mal accueillie».

L'étoile Mao, le «Sceau solaire», marque le Centre de l'Hiver, aux environs du 21 décembre, date du solstice.

L'Hiver s'étend de part et d'autre de cette date ; il débute vers le 5 novembre. Le Rituel Terrestre place l'homme devant les forces de réclusion spécifiques de l'hiver. Bi-cang, la fermeture (des portes), thésaurisation des forces de vie, gouverne l'Hiver. Les énergies sont précieusement enfermées dans les Organes profonds, on évite toute mobilisation vers l'extérieur que supposerait l'exposition au froid ou la transpiration à la suite d'efforts.

C'est ce que désigne le terme de yang cang vivre reclus, ou soigner et nourrir les réserves, qui enjoint de laisser s'effectuer le mouvement naturel de recel. Ce mouvement s'exerce dans la plus extrême profondeur, recel des organes mais aussi recel des fonctions  à l'extraordinaire pérennité, os et moelle, énergie du bassin et sexualité, vaisseaux sanguins et cerveau, Vésicule biliaire et système nerveux.

La position contraire, la dépense des énergies, blesse la fonction de mise en réserve par excellence, le rein, c'est à dire non seulement les fonctions génito urinaires, mais aussi l'ensemble de l'appareil neuro endocrinien. C'et ainsi qu'apparaîtront des troubles paresthésiques, voire des paralysies dans les cas graves liés à l'épuisement des réserves du système nerveux.

L' Animal symbolique du secteur Septentrional est la tortue ou guerrier sombre xuan wu. La tortue résume bien dans sa nature et sa forme les attributs de cang, le recel, lié au mouvement de l'hiver ; En hiver, elle s'enfonce sous la terre, dans la vase des rivières. Elle est bien protégée et défendue par sa carapace. Ses fonctions profondes sont bien administrées, protégées, et tout dans sa manière d'être évite la dépense d'énergie : elle bouge lentement. Elle s'accouple une fois par an. Elle a une grande longévité».